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Maritime Maisie 29122013 (1)S'il est un serpent de mer dans le monde maritime, celui des ports refuges est sans doute l'un des plus anciens ; Il resurgit à chaque fois qu'un navire en avarie grave cherche désespérément un port acceptant de l'accueillir. Rappelons brièvement le concept : "Lorsqu'un navire est victime d'un événement, le meilleur moyen d'empêcher que des dommages ou une pollution ne se produisent du fait de la détérioration progressive du navire est d'alléger sa cargaison et ses soutes, et de réparer l'avarie. Il est préférable que cette opération soit effectuée dans un lieu de refuge. Si les États côtiers peuvent se montrer réticents à accepter des navires endommagés ou désemparés dans leur zone de responsabilité en raison essentiellement des dommages potentiels que cela présente pour l'environnement, il est en fait rarement possible de faire face de manière satisfaisante et efficace à un accident en haute mer. Dans certaines circonstances, plus un navire endommagé est forcé de rester longtemps à la merci des éléments en haute mer, plus son état risque de se détériorer ou plus l'état de la mer, les conditions météorologiques ou l'environnement risquent de changer, créant ainsi une situation qui peut devenir plus dangereuse. C'est pourquoi l'autorisation d'accès à un lieu de refuge pourrait impliquer une décision politique qui ne peut être prise qu'au cas par cas en tenant dûment compte de l'équilibre entre l'avantage pour le navire en difficulté et pour l'environnement d'amener le navire dans un lieu de refuge et le risque que constitue pour l'environnement la présence de ce navire près de la côte."
Ces quelques phrases ne sont pas de notre plume. Elles sont issues d'un document de l'OMI élaboré en 2003 et intitulé "directives sur les lieux de refuge pour les navires ayant besoin d'assistance". Voila donc plus de dix ans que la communauté maritime s'est mise d'accord sur les principes contenus dans ce document, et sur lesquels il n'y a pas réellement de débat, le document ne faisant que rappeler ce qui ne doit être considéré que comme étant des règles de bon sens, connues et et acceptées par tous....sur le papier.
Malheureusement, l'application de ces règles et directives est chaotique et ne se concrétise quasiment jamais. Dernier exemple en date, celui du chimiquier Maritime Maisie, balloté entre la Corée et le Japon depuis plus de 50 jours après avoir été abordé par un autre navire près de Ulsan en Corée le 29 décembre dernier, et surtout après avoir été fortement endommagé par l'incendie qui s'en est suivi durant près de trois semaines.
Pour son malheur, le navire, armé par Aurora Tankers, sous pavillon de Hong-Kong, et qui transportait 29 337 tonnes d'acrylonitrile, matière utilisé pour fabriquer des plastiques et du caoutchouc synthétique et d'autres produits chimiques, a rapidement dérivé dans les eaux nippones avant d'être rattrapé et pris en charge par les remorqueurs chargés de son sauvetage.
Maritime Maisie 29122013 (3)Depuis, c'est le statut quo. Les deux Etats se renvoient la patate chaude (...). Sauf que la structure du navire n'est plus réellement en capacité de résister aux efforts qui lui sont imposés par la navigation sur des mers pas toujours accueillantes. C'est tout le sens du rapport du Lloyd's Register's Ship Emergency Response Service (SERS) daté du 17 février 2014 et qui estime que la coque du navire a atteint ses limites de résistance. On ne peut raisonnablement être plus clair.
Mais voilà, malgré les demandes, les rapports, les alertes, les menaces, rien ne se passe. Et pour une raison finalement très simple et bien connue. Se référant à la résolution OMI A.949 (23), le secrétaire général Peter Hinchliffe de l'International Chamber of Shipping résume ainsi la situation : "Les Lignes directrices sur le traitement des demandes de lieux de refuge a été convenu à l'OMI, mais souvent, quand un cas se présente, les États côtiers concernés adoptent une position de rejet basée sur un "Oui mais pas chez moi" (NIMBY) ; Ceci contraste fortement ce qui se passe en matière d'assistance aux aéronefs ayant besoin d'assistance. Cette affaire actuelle montre que les récentes leçons n'ont tout simplement pas été tirés."
Et comment ne pas lui donner raison. Le seul exemple connu de réussite et d'application intelligente de ce concept a été le traitement du cas du MSC NAPOLI qui menaçait de rompre en pleine Manche, avec le risque de voir plusieurs millliers de conteneurs se perdre et dériver dans le détroit le plus fréquenté du monde....L'intensité de la menace pour le trafic maritime était telle que les Etats côtiers (France et Grande Bretagne) n'avaient finalement que peu de choix quant à la solution à adopter.
Mais voila, tous les navires n'ont pas "la chance" du MSC NAPOLI. En Europe, on peut ainsi se rappeler le traitement catastrophique du pétrolier Prestige qui aboutira à son naufrage et celui tout aussi peu glorieux du MSC FLAMINIA dont on peut raisonnablement penser qu'il ne doit son salut qu'au sérieux de son armateur, de ses assureurs, et des sauveteurs venus stabiliser la situation périlleuse dans laquelle se trouvait le navire. Les Etats disposaient pourtant de tout l'arsenal juridique nécessaire au traitement de ce cas, notamment avec la directive européenne du 27 juin 2002 (Directive 2002/59/C) qui, dans son article 20, impose aux Etats membres la création de lieux de refuge et de plans en vue d'accueillir des navires en détresse dans les eaux relevant de leur juridiction,
Avec de tels exemples, on aurait pu s'attendre de la part d'Etats comme le Japon ou la Corée à un traitement différent, enrichi de l'expérience du vieux continent....
Maritime Maisie 29122013 (5)Malheureusement, il n'en est rien et le navire attend que les Etats cotiers, poussés par l'armateur et l'Etat du pavillon, assument leur responsabilités et appliquent les directives de l'OMI auxquelles ils ont tous deux souscrits. Comme dans les autres cas, les Etats semblent préférer un naufrage qui permettra de "distiller" les responsabilités et surtout d'impliquer de manière quasi-exclusive l'armateur en cas de pollution des côtes, évitant ainsi toute mise en cause de la part de citoyens-électeurs pouvant venir reprocher à l'Etat et ses dirigeants d'avoir accepter la venue d'un navire en difficulté. Cette application de la politique "Not In My Back Yard" finira par conduire à une catastrophe majeure. Il suffit pour celà d'imaginer la répétition, mais avec une fin moins heureuse, du cas du MSC NAPOLI que l'on remplacera avantageusement par un Maersk Triple E en perdition en pleine Manche ou en Mer du Nord. 19 000 conteneurs perdus et dérivant dans ce détroit qui voit passer chaque année plus de 80 000 navires, transportant souvent des marchandises dangereuses, et heurtant, au gré des courants, les autres navires transitant dans le détroit, les navires de pêche, les ferries, etc........

Difficile à envisager. Et pourtant, c'est bien ce qui aurait pu se passer avec le MSC FLAMINIA dont les conteneurs auraient pu dériver dans l'Atlantique. Seul avantage avec les produits chimiques transportés par le Maritime Maisie, ils se disperseront dans l'Océan, ce qui permettra aux autorités concernées que le risque de pollution sur les côtes est minime.....

Rien à attendre non plus du côté de l'OMI qui a indiqué, en réponse à une proposition du Comité Maritime International de s'atteler à la rédaction d'une convention internationale sur les l'accueil des navires en besoin d'assistance et les ports refuges, que tout allait bien et qu'il existait déjà des outils juridiques comme la convention de Nairobi sur le traitement des épaves....Ce qui se passe actuellement en mer du Japon montre, qu'effectivement, tout va bien dans ce domaine.....

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