Les décisions de ce tribunal sont rares et surtout celles concernant un problème de saisie d'un navire d'Etat. Ainsi, dans une décision disponible sur son site internet, le Tribunal international du droit de la Mer (TIBM), qui siège à Hambourg (Allemagne), a demandé ce samedi 15 décembre que les autorités ghanéennes libèrent "immédiatement" la frégate argentine Libertad, retenue depuis le 2 octobre dans le port de Tema au Ghana.
"Le TIBM demande aux autorités du Ghana qu'elles libèrent immédiatement la frégate Libertad et qu'elles l'approvionnent pour qu'elle puisse quitter Tema" (à l'est d'Accra), a indiqué le président du tribunal, le Japonais Shunji Yanai.
Buenos Aires a réclamé vendredi devant le tribunal la libération immédiate, au nom de l'immunité, du navire-école de la marine de guerre argentine, qui avait mouillé à Tema (à 25 km de la capitale Accra), mais n'avait pu en repartir le 2 octobre sur une décision de la justice du Ghana. Celle-ci a été saisie par un fonds spéculatif international qui réclame le paiement de reliquat de dettes à l'Etat argentin.
Le Ghana a, au contraire, demandé le rejet de la plainte de l'Argentine, et que ce pays soit condamné à payer les frais du procès, en plaidant l'incompétence du tribunal. Selon Accra, il n'y a ni urgence pour l'équipage ni dommages irréparables pour les Argentins. Les représentants ghanéens ont estimé que le TIDM était incompétent pour juger d'un "différend commercial privé" : le Tribunal doit rejeter la mesure préventive de l'Argentine, ont-ils dit, en arguant que le bateau n'avait pas d'immunité car Buenos Aires avait émis des bons du Trésor en 1994 conformément à un contrat de "Fiscal Agency agreement" de droit new-yorkais.
En fait, les Argentins "savaient en mai 2012 qu'il existait des risques de saisie du bateau, ce que ne savait pas le Ghana", a assuré l'avocat ghanéen Philippe Sands, en brandissant une lettre du ministère des affaires étrangères de cette date. La délégation argentine a de son côté affirmé vendredi matin que les bateaux de guerre bénéficient de l'immunité au titre de l'article 32 de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982.
C'est une plainte du fonds d'investissement NML Capital Limited qui est à l'origine de la détention du Libertad par les autorités ghanéennes. Ce fonds, qui a son siège aux Iles Caïman, un paradis fiscal, réclame plus de 370 millions de dollars (283 millions d'euros) à l'Argentine après avoir refusé des offres d'échange de titres de dette à deux reprises, en 2005 et 2010.
L'union de ce qui avait pu apparaître comme celle de la carpe et du lapin entre CHEGARAY-DE-CHALUS et GROUPAMA aurait sans doute pu durer si la crise des dettes souveraines que nous connaissons encore aujourd'hui n'avait pas durement frappé la maison mère, GROUPAMA SA, à un point tel que le groupe ne se soit plusieurs fois trouvé au bord du précipice, rattrapé "par les dents" par le gouvernement français, notamment via l'intervention in-extremis de la Caisse des Dépôts et Consignations. La soudaine détérioration des comptes, assortie d'une dégradation tout aussi rapide et brutale de son "rating" par les agences de notation, et notamment par la plus célèbre d'entre elles, Standard & Poors, aura raison de ce mariage scellé en 1999.
Or, dans le monde de l'assurance maritime, et notamment lorsque l'on souscrit des risques internationaux (principalement sur les corps de navires), l'évolution de la notation des agences a un vrai sens et peut impacter directement et parfois rapidement l'activité des compagnies d'assurances opérant dans ce secteur. Il est désormais courant de voir les armateurs (eux-mêmes obligés par les banques auxquelles ils ont emprunté pour financer la construction ou l'achat de navires) imposer aux assureurs couvrant leurs risques une notation minimum délivrée par une agence de notation de renom (S&P, Fitch), et idéalement un A ou plus. L'objet de cette "condition d'assurance" étant d'être notamment sûr que les assureurs fassent face à leurs engagements en cas de sinistre et surtout en cas de perte totale de l'objet assuré et financé.
Autant le dire d'emblée, l'arrivée à bon port du MSC FLAMINIA dans le port de Wilemshafen le 9 septembre dernier nous a laissé un fort goût d'inachevé et cette sensation, partagée par les nombreuses personnes "du métier" avec qui nous avons évoqué cette épopée, que quelque chose n'avait pas fonctionné dans ce dossier, et que le gouvernement français (et sans doute d'autres Etats Côtiers comme la Grande Bretagne) n'avait pas "joué le jeu" du concept de port refuge, laissant finalement l'armateur se débrouiller seul en tenant "à bout de gaffe", et hors de ses eaux sous juridiction, l'indésirable navire.
Un drôle de sentiment que ce dossier a finalement été traîté comme celui du Prestige, pétrolier Libérien qui fut victime d'une déchirure de la coque le 13 novembre 2002 (dont la cause reste inconnue mais que les témoignages des marins font supposer être le résultat d'un heurt avec un conteneur, un objet flottant ou une vague déferlante), et que les autorités espagnoles ont tenté de faire remorquer vers le large avant qu'il ne brise et coule dans la tempête le 19 novembre 2002, sa cargaison de pétrole polluant les côtes du Portugal d'Espagne et de France.
Sauf qu'en 2012, les Etats Côtiers disposaient de tout l'arsenal juridique pour que celà ne pusise se reproduire. Autrement dit, nous aurions eu les armes juridiques mais pas le courage et/ou la volonté de les utiliser. Fort heureusement cette fois-ci, le navire ne s'est pas brisé, n'a pas pollué (ou peu) et n'a pas fini sa vie au fond de l'océan avec, dans le cas présent, plusieurs milliers de conteneurs à la dérive dans l'Océan Atlantique.
Sitôt le navire accosté, plusieurs interviews sont parues dans la presse nationale et régionale comme s'il s'agissait d'éteindre l'incendie de la polémique naissante sur le traitement réservé à ce navire.
Voila plusieurs années que nous suivons de près cette procédure qui vient de connaître un nouveau rebondissement avec l'arrêt de la Cour d'Appel de Paris du 13 janvier 2012. A titre professionnel d'abord en ayant été en charge de la gestion de ce dossier chez Groupama Transport (devenu Helvétia depuis quelques semaines) jusqu'en 2005, puis à titre purement informel et par curiosité juridique depuis.
Autant le dire tout de go, nous partageons pleinement l'avis de la Cour d'Appel de Paris qui, sur renvoi de la deuxième chambre civile de la Cour de Cassation, n'a pas maintenu la position qu'elle avait adopté deux ans plus tôt lorsque cette affaire lui avait été présentée pour la première fois.
Le dossier ne semble pourtant pas complètement terminé, un pourvoi ayant été formé par Helvétia (devant l'Assemblée Pleinière....), preuve s'il en ait de la sensibilité du sujet et de l'importance que représente ces décisions pour les assureurs.
Et on les comprend car, comme nous l'avons écrit depuis plus de deux ans, ce dossier va au delà du cas d'espèce et la décision de la Cour d'Appel de Paris, si le pourvoi ne va pas à son terme ou est rejeté, fera inévitablement jurisprudence et obligera les assureurs maritimes, utilisateurs de ce type de police, à une revue en profondeur des imprimés type qui devront être mis "au goût du jour" et surtout conformes à ce qu'exige le Code des Assurances.
Le titre de notre article aura alors tout son sens et le Droit des Assurances Terrestres, pourtant très récent, et désormais fortement empreint du Droit de la Consommation (encore plus récent), aura gagné sur le Droit des Assurances Maritimes et le Code de Commerce, institutions de notre Droit, dont certaines des règles applicables à la matière qui nous intéresse aujourd'hui, ont été instituées il y a parfois plusieurs siècles.
Dans la version 3 de notre article consacrée à ce sujet, vous trouverez toutes les décisions depuis celle rendue par le TGI de Paris du 29 décembre 2005 et nos commentaires sur cette longue affaire, et les conséquences qui devraient désormais en découler pour les assureurs maritimes.
En attendant la publication complète de cet article, la décision de la Cour d'Appel est disponible ici
Difficile pour Fortunes de Mer de passer à côté de l'exposition qui vient d'ouvrir ses portes à la Bibliothèque nationale de France. Celle-ci accueille à partir de mardi une exposition exceptionnelle consacrée à l'âge d'or des cartes marines, œuvres d'art enluminées dont elle possède la plus importante collection au monde, témoins de 500 ans de représentation européenne du monde.
Près de 200 pièces majeures, dont 80 de ces cartes ou "portulans" datant de la fin du XIIIe siècle jusqu'au XVIIIe siècle, sont exposées ainsi que des globes, atlas, dessins, estampes, objets d'art et ethnographiques, animaux naturalisés et instruments astronomiques ou de mesure.
La BnF, qui possède 500 de ces somptueuses cartes, a également pu compter sur des prêts exceptionnels de musées français et étrangers.
Marco Polo (1254-1324), Christophe Colomb (1450-1506), Magellan (1480-1521)... C'est à travers les voyages au long cours et les grandes expéditions maritimes que la construction de la représentation de la planète a pris corps et que les cartes marines ont été complétées, "mélange merveilleux d'avéré, de découvertes et de fantastique", dit Jean-Yves Sarazin, l'un des commissaires de l'exposition.
"Derrière des documents techniques, il y a des idées fortes : se déplacer, découvrir, immigrer, se donner les moyens d'aller vers des territoires inconnus, sécuriser des trajectoires maritimes pour accroître le commerce", souligne M. Sarazin.
Les luxueux parchemins sont autant de bandes dessinées fabuleuses qui font état d'animaux, de plantes exotiques, de rituels indigènes, voire d'épisodes de cannibalisme. La terre s'ouvre sur des océans immenses qui en redessinent les contours au fil des découvertes. Ce n'est que vers la fin du XIIIe siècle qu'apparaît le premier portulan occidental connu, la carte "pisane", conservée à la BnF et représentant la Méditerranée du détroit de Gibraltar aux principales destinations des croisades.
Grâce aux cartes, les marins, qui jusque-là s'orientent avec des instructions écrites, vont avoir non seulement une idée de plus en plus précise de la position des ports et des caps, des dangers et des distances, mais aussi des débouchés du commerce à l'intérieur des terres et des souverainetés qui s'y exercent.
Une première partie permet de comprendre l'élaboration des cartes dans les principaux centres de production, en Méditerranée et sur les côtes atlantiques.
Les savants ne cesseront de spéculer sur la forme de la terre, ronde, selon les théories de Ptolémée (IIe siècle avant notre ère), un monde sphérique découpé en trois parties (Europe, Afrique, Asie), selon l'héritage judéo-chrétien. C'est sur ces théories que Colomb décidera de rejoindre l'Orient par l'ouest et qu'il découvrira un nouveau continent.
Une deuxième partie analyse le sens politique des cartes, devenant autant de documents de propagande impérialiste.
Le XVe siècle et la fièvre des explorations consacrent les puissances ibériques. En 1448 les marins lusitaniens réfutent la théorie d'un océan indien fermé, en doublant le Cap de Bonne-Espérance. Le Portugal et l'Espagne se partagent le monde, le premier s'implantant en Asie et au Brésil, la seconde en Amérique et aux Philippines.
France, Angleterre et Pays-Bas se lancent aussi à la conquête des richesses de l'Orient: épices, plantes exotiques, or, ivoire et pierres précieuses, traite des Noirs.
Une troisième partie est consacrée à l'Océan indien, une dernière à l'encyclopédisme avec de très précieux atlas
Après l'exposition du France de l'année passée au Musée de la Marine, voici une nouvelle exposition qui mérite un petit détour par la capitale...
En attendant, le dossier de presse est consultable ici et le catalogue de l'exposition peut être acheté ici.
Lancée en novembre 2010, la fusion des différentes conditions d'assurances dites "scandinaves" (Norvège, Suède, Danemark, Finlande) au sein d'un seul et même "plan" vient d'aboutir à la publication du "Nordic Plan 2013".
Bien que présenté comme le premier plan nordique, ce ne sera pas une véritable création de nouvelles conditions. Le plan sera en effet basé sur le Norwegian Plan 1996 dans sa dernière version de 2010 et qui a servi de base aux discussions.
Par contre, ce qui est nouveau, c'est le soutien des quatre principales association d'armateurs nordiques dans l'élaboration du plan, renforçant ainsi sa position reconnue d'un système (très) équitable et équilibré pour protéger les intérêts des armateurs.
Avec son Commentaire complet et le Comité permanent de Révision indépendant, il restera peu d'incertitudes quant à l'interprétation du texte, moins de conflits potentiels et de lacunes dans la couverture, afin notamment de s'adapter aux évolutions du marché.
Le Nordic Plan s'inscrit donc dans la continuité du Norwegian Plan avec en son coeur le modèle de gestion des réclamations et la volonté de proposer un "claims lead" toujours innovant et réactif et dont l'importance ne fera que croître avec l'augmentation de la taille des navires, des problèmes liés aux navigations extrêmes, les problématiques liées aux prérogatives des Etats côtiers en matière de surveillance des navires, la pression médiatique en cas de sinistre majeur, etc...
Ce plan est sans aucun doute promis à un beau succès, comme ses prédecesseurs et il y a fort à parier que bon nombre de courtiers le proposeront à leurs clients pour bien commencer l'année 2013, le plan entrant en vigueur au 1er janvier prochain.
Le plan et son commentaire sont déjà disponibles en lecture sur le site http://www.nordicplan.org .Comme d'habitude, Il sera également en version pdf sur notre site dans quelques jours.
L'histoire ne touche sans doute pas à sa fin mais le premier chapitre est en voie de conclusion. Le transit du cargo MSC Flaminia, en attente au large de l'Angleterre depuis un incendie le 14 juillet et des explosions mortelles, a débuté dimanche dernier à 16h45 en direction de l'Allemagne, a-t-on appris auprès de la préfecture maritime de la Manche et de la Mer du Nord.
Initialement prévu vendredi soir, le départ du cargo de 300 mètres de long et qui transportait 2.876 conteneurs au moment de l'explosion, avait été repoussé pour des raisons techniques liées à son remorqueur, le Fairmount Expedition.
"Le Fairmount Expedition, l'un des remorqueurs composant le convoi assistant le MSC Flaminia, ayant dû ravitailler en carburant et effectuer des changements de personnels samedi 1er septembre, le transit du MSC Flaminia en Manche et mer du Nord a finalement débuté dimanche 2 septembre vers 16h45", a précisé la préfecture dimanche soir dans un communiqué.
Le convoi a quitté sa zone d'attente dans les eaux britanniques, à 40 milles nautiques (environ 75 km) de la pointe anglaise de Penzance.
"Le convoi (...) allant à une allure comprise entre 4 et 5 nouds, devrait se trouver à l'entrée du dispositif de séparation de trafic des Casquets lundi 3 septembre à 13h30 et à l'entrée de celui du Pas de Calais mardi 4 septembre à 14h", a ajouté la préfecture qui note que lors de son transit dans les eaux françaises, "il fera l'objet de la même vigilance que les autres bâtiments naviguant dans cette zone".
Le MSC Flaminia doit être réparé en Allemagne (jade-weser-port-wilhelmshaven) où il est remorqué par le Fairmount Expedition avec l'escorte de deux autres bateaux, les remorqueurs Anglian Sovereign et le Carlo Magno, tous trois opérés par la société néerlandaise spécialisée Smit. Le commandement général allemand des urgences maritimes table sur cinq jours de trajet.
Au terme de semaines de spéculations sur la nature exacte de la marchandise du cargo, qui venait des Etats-Unis, des inspections ont établi la semaine dernière que le navire était en état de remonter la Manche sans risque et que la partie dangereuse de sa cargaison (une quarantaine de tonnes de déchets de PCB) a été détruite dans l'incendie.
A l'heure ou cet article est publié, le navire est au large de Cherbourg et va bientot s'engager dans le détroit du Pas de Calais, l'un des plus fréquentés au monde. Quelques heures plus tard, ce sera la fin de l'acte I de cette fortune de mer aux questions si nombreuses qui n'ont pour la plupart reçu aucune réponse.
Au delà de la théorie du complot sur la nature exacte de la marchandises (auquel semble croire le site Odin.tc) à laquelle nous ne croyons que peu, la vérité étant probablement que les armateurs n'ont qu'une connaissance incomplète de la marchandise qu'ils transportent, le véritable problème posé par cette avarie est l'absence de réaction des Etats Côtiers. Comme nous l'avons déjà écrit sur ce site, les Etats ont demandé à cor et à cri la désignation de ports refuge pour éviter que ne se reproduisent des catastrophes comme celle du Prestige dont on se rappelera qu'elle est essentiellement du à l'absence de courage des autorités espagnoles qui ont voulu à tout prix éloigner le navire plutôt que de l'accueillir dans une baie protégée ou le navire aurait certes pollué, mais sur une étendue moindre ; On connaît le resultat et les centaines de kilomètres de côtes souillées, sans compter les produits toxiques partis par le fond...
C'est dans cette optique que le parlement européen avait adopté le paquet "Erika III", transposé rapidement en Droit Français dans le Code des Transports. Dans le cas du MSC FLAMINIA, en refusant l'entrée dans les eaux sous juridiction française, le gouvernement s'est tout bonnement mis à l'abri de l'application de règles qu'il a lui-même souhaité. Ainsi, en exigeant auparavant que le navire soit "safe", et qu'il soit quasiment certain que le navire ne courre plus aucun danger pour donner l'autorisation d'entrer dans les eaux, le gouvernement a complètement trahi l'esprit du port refuge dont l'objet même est d'accueillir des navires en détresse et dont "le pronostic vital est engagé". Si le navire est en bon état, navigable, que sa stabilité est bonne, qu'il n'y a pas de pollution, d'incendie, de voie d'eau, etc...le navire n'a pas besoin d'un port refuge mais d'un port pour réparer et il peut, à priori, accèder à n'importe quel port, comme les autres navires....Les sorties de nos ministres avaient donc quelque chose de ridicule lorsqu'ils exprimaient leur avis sur ce sujet et qui consistait à dire : OK pour accueillir le MSC FLAMINIA, mais à condition qu'il soit en bon état...
Cet exemple du MSC FLAMINIA n'est pas vraiement encourageant car si d'aventure, le cas se reproduisait avec un armateur moins présent, un navire qui menance réellement de sombrer, il faudra plus que quelques communiqués de presse pour justifier une position de refus d'accueil du navire.